Doctrine de la foi : Le Vatican enseigne le sens des bénédictions

Doctrine de la foi : Le Vatican enseigne le sens des bénédictions

La partie II du dicastère intitulé « Fiducia supplicans » (« La confiance suppliante »), sur la signification pastorale des bénédictions, approuvée par le pape François est très explicite sur la question.

Lire l’extrait du Fiducia supplicans

II. Le sens des diverses bénédictions

7. La réponse du Saint-Père mentionnée ci-dessus nous invite par ailleurs à faire l’effort de développer et d’enrichir le sens des bénédictions. 8. Les bénédictions peuvent être considérées comme l’un des sacramentaux les plus répandus et en constante évolution. Elles conduisent en effet à saisir la présence de Dieu dans tous les événements de la vie et nous rappellent que, même dans l’usage des choses créées, l’être humain est invité à chercher Dieu, à l’aimer et à le servir fidèlement[7]. C’est pourquoi les bénédictions ont pour destinataires des personnes, des objets de culte et de dévotion, des images sacrées, des lieux de vie, de travail et de souffrance, des fruits de la terre et du labeur humain, et toutes les réalités créées qui renvoient au Créateur et qui, par leur beauté, le louent et le bénissent. Le sens liturgique des rites de bénédiction 9. D’un point de vue strictement liturgique, la bénédiction exige que ce qui est béni soit conforme à la volonté de Dieu telle qu’elle est exprimée dans les enseignements de l’Église. 10. Les bénédictions sont en effet célébrées en vertu de la foi et sont ordonnées à la louange de Dieu et au profit spirituel de son peuple. Comme l’explique le Rituel romain, « pour que cette fin soit plus évidente, selon l’ancienne tradition, les formules de bénédiction ont avant tout pour but de rendre gloire à Dieu pour ses dons, de demander ses faveurs et de vaincre le pouvoir du malin dans le monde »[8]. C’est pourquoi ceux qui invoquent la bénédiction de Dieu par l’intermédiaire de l’Église sont invités à intensifier « leurs dispositions, en se laissant guider par cette foi pour laquelle tout est possible » et à se confier à « cet amour qui pousse à observer les commandements de Dieu »[9]. C’est pourquoi, si d’un côté « il y a toujours et partout l’occasion de louer, d’invoquer et de rendre grâce à Dieu par le Christ, dans l’Esprit Saint », il faut veiller de l’autre à « ce qu’il ne s’agisse pas de choses, de lieux ou d’événements contraires à la loi ou à l’esprit de l’Évangile »[10]. Ceci est une compréhension liturgique des bénédictions, en tant qu’elles deviennent des rites officiellement proposés par l’Église. 11. Se fondant sur ces considérations, la Note explicative du Responsum cité plus haut de l’ancienne Congrégation pour la Doctrine de la Foi rappelle que, lorsqu’une bénédiction est invoquée sur certaines relations humaines au moyen d’un rite liturgique approprié, il est nécessaire que ce qui est béni puisse correspondre aux desseins de Dieu inscrits dans la Création et 5 pleinement révélés par le Christ Seigneur. C’est pourquoi, étant donné que l’Église a toujours considéré comme moralement licites uniquement les relations sexuelles vécues dans le cadre du mariage, elle n’a pas le pouvoir de conférer sa bénédiction liturgique lorsque celle-ci peut, d’une certaine manière, offrir une forme de légitimité morale à une union qui se présente comme un mariage ou à une pratique sexuelle extra maritale. La substance de cette prise de position a été réitérée par le Saint-Père dans ses Respuestas aux Dubia de deux Cardinaux. 12. Il faut aussi éviter le risque de réduire le sens des bénédictions à ce seul point de vue, car cela nous conduirait à exiger pour une simple bénédiction les mêmes conditions morales que celles qui sont exigées pour la réception des sacrements. Ce risque exige que nous élargissions encore cette perspective. En effet, le danger existe qu’un geste pastoral, si aimé et si répandu, soit soumis à trop de conditions morales préalables qui, sous prétexte de contrôle, pourraient obscurcir la force inconditionnelle de l’amour de Dieu sur lequel se fonde le geste de la bénédiction. 13. C’est précisément à cet égard que le Pape François nous a exhortés à ne pas « perdre la charité pastorale qui doit passer par toutes nos décisions et nos attitudes » et à éviter de « nous constituer en juges qui ne font que refuser, rejeter, exclure »[11]. Répondons donc à sa proposition en développant une compréhension plus large des bénédictions. Les bénédictions dans l’Écriture Sainte 14. Pour réfléchir aux bénédictions, en recueillant différents points de vue, nous devons nous laisser éclairer avant tout par la voix de l’Écriture Sainte. 15. « Que le Seigneur te bénisse et te garde. Que le Seigneur fasse briller sur toi son visage, qu’il te prenne en grâce. Que le Seigneur tourne vers toi son visage, qu’il t’apporte la paix » (Nb 6, 24-26). Cette « bénédiction sacerdotale » que nous trouvons dans l’Ancien Testament, plus précisément dans le livre des Nombres, a un caractère « descendant » puisqu’elle représente l’invocation de la bénédiction qui descend de Dieu sur l’homme: elle constitue l’un des plus anciens textes de bénédiction divine. Il y a ensuite un deuxième type de bénédiction que nous trouvons dans les pages bibliques, celle qui « monte » de la terre vers le ciel, vers Dieu. La bénédiction équivaut alors à louer, célébrer, remercier Dieu pour sa miséricorde et sa fidélité, pour les merveilles qu’il a créées et pour tout ce qui est arrivé 6 par sa volonté: « Bénis le Seigneur, ô mon âme, bénis son nom très saint, tout mon être » (Ps 103,1). 16. A Dieu qui bénit, nous aussi, nous répondons par la bénédiction. Melkisédek, roi de Salem, bénit Abraham (cf. Gn 14, 19) ; Rébecca est bénie par sa famille juste avant de devenir la femme d’Isaac (cf. Gn 24, 60), qui à son tour bénit son fils Jacob (cf. Gn 27, 27). Jacob bénit Pharaon (cf. Gn 47, 10), ses petits-fils Éphraïm et Manassé (cf. Gn 48, 20) et ses douze fils (cf. Gn 49, 28). Moïse et Aaron bénissent la communauté (cf. Ex 39, 43 ; Lv 9, 22). Les chefs de famille bénissent leurs enfants lors des mariages, avant d’entreprendre un voyage, à l’approche de la mort. Ces bénédictions apparaissent ainsi comme un don surabondant et inconditionnel.

17. La bénédiction présente dans le Nouveau Testament conserve essentiellement la signification de l’Ancien Testament. Nous retrouvons le don divin qui « descend », l’action de grâce de l’homme qui « monte » et la bénédiction donnée par l’homme qui « s’étend » vers ses semblables. Zacharie, ayant retrouvé l’usage de la parole, bénit le Seigneur pour ses merveilles (cf. Lc 1, 64). Le vieillard Siméon, tenant dans ses bras le nouveau-né Jésus, bénit Dieu pour lui avoir accordé la grâce de contempler le Messie sauveur, puis il bénit également ses parents Marie et Joseph (cf. Lc 2, 34). Jésus bénit le Père, dans le célèbre hymne de louange et de jubilation qui lui est adressé: « Père, Seigneur du ciel et de la terre, je proclame ta louange » (Mt 11,25).

18. Dans la continuité de l’Ancien Testament, la bénédiction en Jésus n’est pas seulement ascendante, se référant au Père, mais aussi descendante, répandue sur les autres comme un geste de grâce, de protection et de bonté. Jésus lui-même a mis en œuvre et encouragé cette pratique. Par exemple, il bénit les enfants: « Il les embrassait et les bénissait en leur imposant les mains » (Mc 10,16). Et la vie terrestre de Jésus se terminera précisément par une dernière bénédiction réservée aux Onze, peu avant de monter vers le Père: « Et, levant les mains, il les bénit. Or, tandis qu’il les bénissait, il se sépara d’eux et il était emporté au ciel » (Lc 24, 50-51). La dernière image de Jésus sur la terre, ce sont ses mains levées, en train de bénir.

19. Dans son mystère d’amour, à travers le Christ, Dieu communique à son Église le pouvoir de bénir. Accordée par Dieu à l’être humain et octroyée par lui à son prochain, la bénédiction se transforme en inclusion, en solidarité et en pacification. C’est un message positif de réconfort, de sollicitude et d’encouragement. La bénédiction exprime l’étreinte miséricordieuse de Dieu et la maternité de l’Église qui 7 invite les fidèles à avoir les mêmes sentiments que Dieu envers leurs frères et sœurs. Une compréhension théologico-pastorale des bénédictions

20. Celui qui demande une bénédiction montre qu’il a besoin de la présence salvifique de Dieu dans son histoire, et celui qui demande une bénédiction à l’Église reconnaît l’Église comme sacrement du salut que Dieu offre. Chercher une bénédiction dans l’Église, c’est admettre que la vie de l’Église jaillit du sein de la miséricorde de Dieu et nous aide à avancer, à mieux vivre, à répondre à la volonté du Seigneur.

21. Pour nous aider à comprendre la valeur d’une approche plus pastorale des bénédictions, le Pape François nous a invités à contempler, avec une attitude de foi et de miséricorde paternelle, le fait que « lorsqu’on demande une bénédiction, il s’agit d’une demande d’aide adressée à Dieu, d’une prière pour pouvoir vivre mieux, d’une confiance en un Père qui peut nous aider à vivre mieux »[12]. Cette demande doit être valorisée, accompagnée et accueillie avec gratitude. Les personnes qui viennent spontanément demander une bénédiction manifestent par cette demande leur ouverture sincère à la transcendance, la confiance de leur cœur qui ne s’appuie pas uniquement sur leurs propres forces, leur besoin de Dieu et leur désir de sortir de l’étroitesse de ce monde refermé sur lui-même.

22. Comme nous l’enseigne Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus, au-delà de cette confiance « il n’y a pas d’autre chemin pour nous conduire à l’Amour qui donne tout. Par la confiance, la source de la grâce déborde dans nos vies […]. L’attitude la plus appropriée est donc de mettre la confiance du cœur hors de soi-même, en la miséricorde infinie d’un Dieu qui aime sans limites […]. Le péché du monde est immense, mais il n’est pas infini. En revanche, l’amour miséricordieux du Rédempteur est infini »[13].

23. Lorsque ces expressions de la foi sont considérées en dehors d’un cadre liturgique, on se trouve dans un domaine de plus grande spontanéité et liberté, mais « le caractère facultatif des pieux exercices ne peut en aucun cas signifier une quelconque méconnaissance, ni même le mépris à leur égard. L’attitude juste qu’il convient d’adopter est, au contraire, celle qui consiste à valoriser d’une manière adéquate et avec sagesse, les richesses non négligeables de la piété populaire, avec ses potentialités »[14]. Les bénédictions deviennent ainsi une ressource pastorale à valoriser plutôt qu’un risque ou un problème. 8 24. Considérées du point de vue de la pastorale populaire, les bénédictions doivent être évaluées comme des actes de dévotion qui « ont une place qui leur est propre, en dehors de la célébration de l’Eucharistie et des autres sacrements […]. Le langage, le rythme, la configuration, les accents théologiques de la piété populaire se différencient bien des éléments correspondants dans les actions liturgiques ». Pour la même raison, « il faut éviter de qualifier les pieux exercices de “célébrations liturgiques”, car ils doivent conserver leur propre style, leur simplicité et leur langage particulier »[15].

25. En outre, l’Église doit éviter de faire reposer sa pratique pastorale sur la fixité de certains schémas doctrinaux ou disciplinaires, surtout lorsqu’ils donnent lieu à « un élitisme narcissique et autoritaire, où, au lieu d’évangéliser, on analyse et classifie les autres, et, au lieu de faciliter l’accès à la grâce, les énergies s’usent dans le contrôle »[16]. Par conséquent, lorsque des personnes invoquent une bénédiction, une analyse morale exhaustive ne devrait pas être posée comme condition préalable à l’octroi de cette bénédiction. Aucune perfection morale préalable ne doit être exigée de leur part.

26. Dans cette perspective, les Respuestas du Saint-Père aident à mieux approfondir, d’un point de vue pastoral, la prise de position formulée par l’ancienne Congrégation pour la Doctrine de la Foi en 2021, puisqu’elles invitent en fait à un discernement sur la possibilité de « formes de bénédiction, demandées par une ou plusieurs personnes, qui ne véhiculent pas une conception erronée du mariage »[17] et qui tiennent également compte du fait que, dans des situations moralement inacceptables d’un point de vue objectif, « la charité pastorale elle-même exige que nous ne traitions pas simplement de “pécheurs” d’autres personnes dont la culpabilité ou la responsabilité peuvent être atténuées par divers facteurs qui ont une incidence sur l’imputabilité subjective »[18].

27. Dans la catéchèse citée au début de cette Déclaration, le Pape François a proposé une description de ce type de bénédictions qui sont offertes à tous, sans rien demander. Il vaut la peine de lire avec un cœur ouvert ces mots qui nous aident à saisir le sens pastoral des bénédictions offertes sans condition: « C’est Dieu qui bénit. Dans les premières pages de la Bible, c’est une répétition incessante de bénédictions. Dieu bénit, mais les hommes aussi bénissent, et très vite on découvre que la bénédiction possède une force spéciale, qui accompagne pendant toute sa vie celui qui la reçoit, et qui dispose le cœur de l’homme à se laisser changer par Dieu […]. Nous sommes plus importants pour Dieu que tous les péchés que nous pouvons 9 commettre, car Il est père, Il est mère, Il est amour pur, Il nous a bénis pour toujours. Et Il ne cessera jamais de nous bénir. Une expérience forte est de lire ces textes bibliques de bénédiction dans une prison, ou dans une communauté de réinsertion. Faire sentir à ces personnes qu’elles restent bénies malgré leurs graves erreurs, que le Père céleste continue à vouloir leur bien et à espérer qu’elles s’ouvrent finalement au bien. Même si leurs parents les plus proches les ont abandonnées, parce qu’ils les jugent désormais irrécupérables, pour Dieu ce sont toujours ses enfants. »[19].

28. Il existe de nombreuses occasions où les personnes viennent spontanément demander une bénédiction, que ce soit lors de pèlerinages, dans des sanctuaires, ou même dans la rue lorsqu’elles rencontrent un prêtre. A titre d’exemple, nous pouvons nous référer au livre liturgique De Benedictionibus, qui propose une série de rites de bénédiction pour les personnes: personnes âgées, malades, participants à la catéchèse ou à une réunion de prière, pèlerins, personnes qui partent en voyage, groupes et associations de bénévoles, etc. Ces bénédictions s’adressent à tous, personne ne doit en être exclu. Dans l’introduction du Rite de bénédiction des personnes âgées, par exemple, il est indiqué que le but de la bénédiction « est d’exprimer aux personnes âgées un témoignage fraternel de respect et de gratitude, et de remercier le Seigneur avec elles pour les bienfaits qu’elles ont reçus de lui et pour les bonnes actions qu’elles ont accomplies avec son aide »[20]. Dans ce cas, l’objet de la bénédiction est la personne âgée, pour laquelle et avec laquelle on rend grâce à Dieu pour les bonnes actions qu’elle a accomplies et pour les bienfaits qu’elle a reçus. Personne ne peut être exclu de cette action de grâce et chacun, même s’il vit dans des situations qui ne sont pas conformes au plan du Créateur, a des éléments positifs pour lesquels il peut louer le Seigneur. 29. Du point de vue de la dimension ascendante, lorsqu’on prend conscience des dons du Seigneur et de son amour inconditionnel, même dans des situations de péché, en particulier lorsqu’une prière est entendue, le cœur du croyant élève sa louange et sa bénédiction vers Dieu. Cette forme de bénédiction n’est interdite à personne. Chacun – individuellement ou en union avec d’autres – peut élever sa louange et sa gratitude à Dieu.

30. Mais le sens populaire de la bénédiction inclut aussi la valeur de la bénédiction descendante. Si « il n’est pas opportun qu’un diocèse, une Conférence des évêques ou toute autre structure ecclésiale mette en place constamment et officiellement des procédures ou des règles 10 pour toutes sortes de questions »[21], la prudence et la sagesse pastorales peuvent suggérer que, pour éviter de graves formes de scandale ou de confusion parmi les fidèles, le ministre ordonné s’associe aux prières des personnes qui, bien que vivant une union qui ne peut en aucun cas être comparée au mariage, désirent se confier au Seigneur et à sa miséricorde, invoquer son aide et être guidées vers une plus grande compréhension de son dessein d’amour et de vérité.

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